La perte de chance est la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable définitivement perdue. Elle est un substitut d’une causalité indécise. Lorsqu’un fait dommageable survient dans le secteur médical, la victime peut avoir intérêt à demander l’indemnisation de la perte de cette éventualité favorable. Il s’agit de l’éventualité serait survenu si le fait litigieux n’était pas survenu. Il y a certaines hypothèses où la perte de chance en droit médical peut être réclamée (I), mais la chance espérée ne sera jamais réparée en totalité (II).
I- Les hypothèses de perte de chance en droit médical
La perte de chance consiste à indemniser une incertitude.
Or il ne peut pas être certain que si la faute n’avait pas été commise la guérison, ou l’amélioration de l’état du patient aurait pu être obtenue. La certitude tient au fait que si la faute n’avait pas été commise, le malade avait des chances de guérison ou d’amélioration et que la faute l’a privé de cette chance.
C’est dans un arrêt du conseil d’Etat que la perte de chance a été utilisée pour la première fois en matière de responsabilité médicale. (CE 24 avr. 1964 Hôpital-Hospices de Voiron : à propos d’un patient qui avait perdu la possibilité d’échapper à une amputation).
La perte de chance doit être sérieuse, et doit être en lien direct avec le préjudice subi. Il s’agit de se demander si la faute médicale a effectivement ou non privé le malade de la possibilité de voir son état s'améliorer ou cesser de se détériorer. Par exemple : le manque de précautions de la part d'un chirurgien-dentiste, dès lors que si la précaution avait été prise, elle aurait pu avoir une influence favorable sur l'évolution de la pathologie (1ère civ. 22 mars 2012 n° 11-10935). Outre l’évolution favorable, la haute juridiction indemnise la perte de chance de survie qui est transmise dans le patrimoine des héritiers (Par exemple : 1ère civ, 13 juill. 2016 n° 15-18.370).
Il peut s’agir également d’un défaut de diagnostic dès lors que celui-ci est fautif (par ex : CAA Marseille, 22 juill. 2020 n° 19MA00976).
La perte de chance en droit médical peut également intervenir en cas de retard d’intervention ou d’un défaut d’un bilan en matière pré anesthésique. Partant, lorsqu’une privation d’une potentialité favorable trouve sa cause dans le fait d’un médecin qui n’a pas été diligent en vertu des données acquises de la science, le préjudice de perte de chance pourra être indemnisé.
La perte de chance en droit médical peut également résulter d’un défaut d’information. L’article 35 du code de déontologie médicale impose en effet une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’on lui propose. Lors de la réalisation d’un acte médical, le médecin doit informer le patient sur les risques fréquents ou graves normalement prévisibles. A noter qu’un risque exceptionnel peut être normalement prévisible (1ère civ. 7 oct. 1998 JCP G 1998). Lorsque ce risque n’a pas été communiqué au patient, celui-ci pourra demander réparation d’un préjudice d’impréparation et/ou d’une perte de chance.
Cependant, la victime doit rapporter, pour obtenir réparation de la perte de chance, la preuve que s’il avait eu connaissance de ce risque, il aurait pu refuser l’acte litigieux. Il doit donc y avoir une alternative possible. La perte de chance en droit médical ne sera pas indemnisée si l’état du patient ne lui aurait pas permis de refuser l’acte médical (ex : 1ère civ, 13 nov. 2002).
Si la perte de chance d’une éventualité favorable actuelle et certaine est imputable à une faute du médecin, elle est indemnisable. Cependant, l’avantage manqué ne sera pas indemnisé en totalité.
II- L’indemnisation partielle de la perte de chance
La réparation de la perte de chance en droit médical, comme en toute matière, doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée (1ère civ, 16 juill. 1998 96-15.380).
Le juge va devoir évaluer la situation de la victime si la chance s'était réalisée. Par exemple, en cas de défaut d’information, la victime n’aurait pas effectué l’acte médical qui lui a causé le dommage. Le juge va alors évaluer le préjudice final subi par la victime et le degré de probabilité de l'issue favorable. Lorsqu’il y a une perte de chance en matière médicale, il n’y aura réparation que d’une fraction du préjudice que la victime subie, il s’agit en effet d’une indemnisation qui correspond à l’importance de la chance perdue.
La cour de cassation rappelle fréquemment qu’il s’agit d’une indemnisation de la fraction du préjudice et non d’une indemnisation forfaitaire (Par exemple : 2ème civ, 15 déc. 2016 n° 15-27.305).
Elle a également précisé que « la réparation ne se limite pas au préjudice moral mais correspond à une fraction des différents chefs de préjudice subis ». (Cass. 1ère civ, 29 juin 1999, n° 97-14.254).
Le calcul de la perte de chance en droit médical se fait en fonction du degré de probabilité d’échapper au dommage. Les juges n’ont pas les compétences médicales pour se livrer à ce calcul qui reste donc soumis aux avis des experts.
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